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Flavia Manyari - 20 mai 2021

Flavia Manyari - 20 mai 2021

Quand le cinéma rencontre
Edward Hopper

ÉVEILLEZ VOS SENS...

Flavia Manyari - 15 juillet 2021

Mobirise

                                                                         Le peintre américain Edward Hopper

"Quand je n’arrivais pas à peindre, j’allais au cinéma pendant une semaine ou plus » dit le peintre lors d’une interview. A travers des compositions principalement basées sur un usage particulier de la lumière, l’oeuvre d’Edward Hopper va longtemps influencer le cinéma tant dans la forme que sur le fond. 

Le cinéma étant l’une des formes d’art les plus récentes, il était inévitable qu’elle puise parfois son inspiration dans les plus anciennes. Figure emblématique de l’impressionnisme au 20ème siècle, Edward Hopper constitue le parfait exemple de l’artiste entremêlé entre peinture et cinéma. En effet, ce ne sont pas uniquement les cinéastes qui s’inspirent des oeuvres du peintre, mais Hopper lui-même qui dépeint une esthétique propre au cinéma dans ses peintures. 

• • • De la lumière naturelle à la lumière artificielle 

Né en 1882, le peintre américain se retrouve à grandir aux côtés des films de l’âge d’or hollywoodien. Ses peintures commencent à réellement se faire connaître durant la période d’entre-deux-guerre, qui marque également des changements successifs et radicaux dans l’industrie cinématographique. En effet, le début des années 30 symbolise le déclin du cinéma muet par l’arrivée d’améliorations techniques importantes, parmi lesquelles figurent l’apparition de l’éclairage artificiel. Cinéphile depuis son plus jeune âge, cette mise au point technique va avoir un impact conséquent dans la carrière du peintre. 

Rappelons rapidement que préalablement à cette avancée technique, l’éclairage utilisé pendant le tournage d’un film avait comme unique source la lumière du soleil. Souvent trop faible pour illuminer entièrement le plateau de tournage, celle-ci pouvait être parfois accentuée à l’aide de panneaux en verre. La présence d’appareils plus performants va donc donner plus de libertés au réalisateur et par conséquent complètement bouleverser certaines techniques cinématographiques jusqu’alors utilisées. Ayant désormais la possibilité de contrôler l’éclairage comme ils le souhaitent, la lumière devient rapidement un élément récurrent et capital dans les films des années 30 et 40. Si l’utilisation d’un éclairage artificiel donne l’impression de réduire le côté réaliste du cinéma, il va permettre aux réalisateurs de créer des mises en scènes et ainsi de dévoiler — et de cacher — des éléments précis dans un but à la fois narratif et esthétique. 

C’est l’émergence de ces nouveaux procédés qui va attirer l’attention du peintre américain et ce pourquoi la lumière jouera un rôle essentiel dans ses tableaux tout au long de sa vie d’artiste. De cette manière, on peut dire que les peintures d’Edward Hopper s’inspirent et ont inspiré principalement deux genres cinématographiques du 20ème siècle : le film noir et le réalisme poétique

• • • Le film noir et le réalisme poétique : une influence presque réciproque

 Il est correct de supposer que les influences entre Edward Hopper et le film noir ont presque toujours été réciproques. Quand on parle du film noir, on pense immédiatement aux jeux d’ombre et de lumière, à la tension omniprésente causée par l’impossibilité de savoir ce qui se trouve derrière celle-ci ou même en hors champ. C’est ce type d’émotions qu’on retrouve autant chez le genre que chez Hopper. 

Quant au réalisme poétique, les cinéastes appartenant au genre prennent leur influence de l’oeuvre d’Hopper dans leur volonté de montrer un personnage à la marge de la société. En effet, les peintures de l’artiste américain se font connaître notamment pour leur représentation d’une Amérique urbaine où la solitude règne. Hopper est l’un des premiers artistes à ne plus montrer ce qui renvoyait autrefois au rêve américain. La majorité de ses peintures reflètent le retour à une réalité dans laquelle les personnages souffrent et sont remplis d’humanité. Les films du réalisme poétique vont donc montrer une ère du cinéma dans laquelle les couleurs, les émotions et le rêve des personnages prédominent. 

• • • 3 cinéastes qui s’inspirent de l’esthétisme pictural d’Hopper
Wim Wenders

                                      "Hawkins" de l'artiste Edward Hopper

"The End of Violence" de Wim Wenders

À la fois photographe et cinéaste, Wim Wenders est probablement l’artiste qui s’inspirera le plus du peintre américain. D’origine allemande, le réalisateur a constamment montré son admiration pour Hopper tout au long de sa carrière. Que ce soit sur le plan à droite, extrait du film The End of Violence, et la peinture Hawkins à gauche, on retrouve la même composition picturale et architecturale à travers la présence des personnages, du lieu et de la lumière. 

The End of Violence met en scène l’histoire d’un producteur de films qui se retrouve à être poursuivi après avoir mis la main sur des informations confidentielles. Ici Wenders reproduit presque à l’identique les éléments du tableau d’Hopper, dans lequel on retrouve notamment l’un des thèmes principaux du peintre : la solitude. Hawkins reflète une image solitaire de l’Amérique, où seuls les moments calmes et silencieux ont de l’importance. Il choisit de mettre en arrêt un instant précis lui permettant créer une intemporalité. Bien qu’à l’apparence artificielle, c’est la lumière qui aide à installer une atmosphère froide dans le tableau. 

Mobirise

                                                           Exposition Edward Hopper

L’admiration du cinéaste pour le peintre américain est telle que ce dernier a réalisé un court-métrage à son sujet, intitulé Two or Three Things I Know about Edward Hopper , lors d’une exposition consacrée à l’artiste en 2020 à la fondation Beyeler. 

Alfred Hitchcock 

                                                                    "Night Windows" de Edward Hopper

  "Fenêtre sur cours" de Alfred Hitchcock

Edward Hopper apparaît également dans les films d’un des réalisateurs les plus connus du siècle dernier : Alfred Hitchcock. C’est le cas avec son oeuvre « Fenêtre sur cour » où le cinéaste d’origine britannique reprend l’atmosphère voyeuriste qu’on retrouve dans le tableau intitulé « Night Windows ». Tout comme le premier exemple, le film dépeint une Amérique urbaine où la vie est à la fois présente et absente. Dans Fenêtre sur cour, le spectateur suit l’histoire d’un journaliste solitaire qui possède comme principal passe-temps l’épiage des habitants de l’immeuble d’en face. 

La présence des fenêtres et du personnage féminin sont les deux premiers éléments qui nous tapent à l’oeil quand on compare le plan du film avec la peinture d’Hopper. Comme Hawkins, il nous est impossible de voir le visage de la femme. Tout nous semble porter à croire qu’elle est en train d’être observée sans son consentement. Ce voyeurisme omniprésent chez Hopper est d’autant plus notable à travers l’utilisation du cadrage, procédé qu’on assimile généralement au cinéma. En effet, les oeuvres du peintre possèdent des caractéristiques cinématographiques autre que la lumière, qui sont le cadrage et point de vue. L’allusion à un possible hors-champ (ce qui n’est pas visible à l’intérieur du plan) détient également d’une importance capitale dans le travail du peintre. 

Jim Jarmusch

                                      "Gas" et "Chair car" de l'artiste peintre Edward Hopper

"Mystery Train" de Jim Jarmusch

Dans "Mystery Train", c’est l’ambiance générale du film qui renvoie à l’esthétique bien particulière du peintre. Réalisateur américain, Jim Jarmusch s’attache à la représentation d’une ville urbaine froide et solitaire. Après deux long-métrages en noir et blanc, "Mystery Train" marque une rupture apparente dans la carrière du cinéaste. Les scènes sont couvertes de différents gris, bleus et vert contrastant presque toujours avec un rouge éclatant. Cette palette bien spécifique à Hopper va le plus souvent apparaître pendant les scènes de nuit. Seuls ou à deux, les personnages se retrouvent au sein de rues désertes entourées d’immeubles qui semblent inhabités. On rappellera également que les films de Jarmusch tendent à amener les personnages, habituellement isolés de la société, à la rencontre d’autres personnes les forçant ainsi à sortir de la routine. 

Le choix des lieux est également un élément capital dans notre comparaison avec les oeuvres d’Edward Hopper. Hôtels, restaurants, trains ou stations de services font constamment leur apparition tout au long du film. Autant dans "Mystery Train" que chez les oeuvres d’Edward Hopper, les lieux influencent l’atmosphère de l’histoire qui est en train d’être racontée.

• • • le mot de la fin ...

 Edward Hopper est sans aucun doute, un peintre phare du 20ème siècle. A travers une composition picturale bien précise, il est parvenu à influencer les plus grands noms du cinéma ainsi que les cinéastes plus contemporains. Isolement social, vie urbaine ou encore voyeurisme, les thèmes abordés dans les oeuvres d’Hopper continuent encore d’être repris par les artistes d’aujourd’hui. 

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